Oubli ou négligence ? Le président de la cour d’assises du Maine-et-Loire s’est occupé d’une affaire qu’il avait connue quand il était encore au parquet. Il s’est rendu compte trop tard d’un évident problème d’impartialité.
On ne peut pas être juge et partie. Tout le monde connaît la célèbre maxime. Mais quand il s’agit de l’appliquer, ça peut devenir plus compliqué. Pour tout un chacun. A fortiori pour un magistrat qui préside la cour d’assises du Maine-et-Loire.
Un cas d’école ?
La mésaventure pourrait finir par être enseignée dans les facs de droit. Lundi 20 et mardi 21 septembre devait se tenir un procès très attendu. Celui d’un Francilien de 36 ans, jaloux au point de traverser, en novembre 2014, la moitié de la France pour venir à le rencontrer de l’amant de sa compagne, à Angers.
Pas vraiment une visite de courtoisie en pleine nuit : il est arrivé habillé de la tête aux pieds avec une combinaison blanche, armé d’un gourdin, avec, dans le coffre de sa voiture tapissé d’une bâche en plastique, 19 bouteilles d’acide sulfurique… Ce jour-là, son rival avait eu la bonne idée de ne pas être chez lui.
Jusqu’à la Cour de cassation
Après d’âpres débats qui ont occupé jusqu’à la Cour de cassation, ce trentenaire a été renvoyé devant la cour d’assises du Maine-et-Loire pour tentative d’assassinat. Mais le procès attendra encore. Car le président désigné depuis au moins le printemps dernier a pris en compte très tardivement… le fait qu’il avait traité cette affaire quand il officiait encore au parquet d’Angers.
Refus d’aviser la famille
Dans un procès-verbal de police de l’époque de l’interpellation, qui figure dans les premières pages de la procédure, l’officier de police judiciaire indique qu’il se réfère à Xavier Lenoir en sa qualité de vice-procureur. Vice-procureur qui refuse, par exemple, que la famille du suspect soit avisée.
Impartialité
Simple négligence ou choix délibéré ? Étonnamment, entre le printemps et la fin août, personne ne voit le problème d’impartialité du président-parquetier. À commencer par l’intéressé. Qui ne se dessaisit du dossier qu’au 31 août, trois semaines avant le début du procès, au bénéfice d’un de ses collègues. Trop tard : avant de se démettre, Xavier Lenoir avait ordonné une expertise psychiatrique.
Or, la loi et le droit sont formels : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial, rappelle l’article 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme. Il en résulte que ne peut participer au jugement d’une affaire un magistrat qui en a connu en qualité de représentant du ministère public. »
Calendes grecques
Le nouveau président a dû signer à la hâte, ce jeudi 16 septembre, une ordonnance pour retirer l’affaire du rôle de la cour d’assises, tout en missionnant un nouvel expert. Contactée en début de soirée ce jeudi 16 septembre, la cour d’appel n’a pas répondu à notre message. Le procès de cette affaire qui remonte à près de sept ans est, lui encore, remis aux calendes grecques.