Josu Antonio Urrutikoetxea Bengoetxea de son vrai nom, 70 ans aujourd’hui, devait être jugé en appel pour « association de malfaiteurs terroristes » en raison de son appartenance au mouvement entre 2002 et 2005.
A 70 ans, celui qui est considéré comme le « grand-père » de l’organisation séparatiste basque Euskadi ta Askatasuna (ETA, « Pays basque et liberté »), Josu Ternera, devait être jugé en appel pour « association de malfaiteurs terroriste » en raison de son appartenance au mouvement entre 2002 et 2005. La cour d’appel de Paris a renvoyé, lundi 13 septembre, son procès en raison d’irrégularités dans le dossier.
« Tout est irrégulier, du mandat d’arrêt à l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel (…) La cour estime qu’elle ne peut être saisie et décide de faire droit aux conclusions et de renvoyer le ministère public à mieux se pourvoir », a indiqué la présidente de la cour d’appel. Les avocats de la défense ont salué une décision qui « s’imposait », selon eux, ajoutant que le juge d’instruction devait dire exactement pourquoi Josu Antonio Urrutikoetxea Bengoetxea, de son vrai nom, devait être jugé.
Dans ce dossier, il avait été condamné en 2010 à cinq ans de prison en première instance puis sept ans en appel. Mais comme ces peines ont été prononcées en son absence, il a pu demander à être rejugé en personne. Lors de l’audience de lundi, les avocats de Josu Ternera ont pointé du doigt le mandat d’arrêt et l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, « pas assez précis », selon eux. « Le mandat d’arrêt n’était pas clair, on ne savait pas ce qu’on lui reprochait : est-ce que c’était son appartenance à l’ETA, est-ce que c’était d’avoir eu une activité terroriste ? », a déclaré Me Laurent Pasquet-Marinacce à l’issue de l’audience
Ternera pourrait être remis à l’Espagne
Josu Ternera a été désigné en 1999 comme l’un des trois négociateurs dans le processus de paix finalement avorté. C’est lui qui, le 3 mai 2018, a annoncé la dissolution de l’organisation. Selon l’accusation, ses empreintes et celles de son fils ont été retrouvées en 2002 dans des caches de l’ETA dans le sud-ouest de la France, à Lourdes et Villeneuve-sur-Lot, ainsi que dans un véhicule. Il assure avoir coupé tout lien avec l’ETA dès l’automne 2006.
Début septembre, le tribunal de Paris l’a relaxé de faits de participation à une « association de malfaiteurs terroriste » entre 2011 et 2013, n’ayant trouvé « aucune trace » de son engagement actif au sein de l’organisation basque à cette période-là.
Une fois les procédures judiciaires françaises terminées, Josu Ternera pourrait être remis à l’Espagne, la Cour de cassation ayant accepté en novembre 2020 le principe de son extradition demandée par Madrid. Convoqué par la justice espagnole en 2002, Josu Ternera était entré en clandestinité et avait été arrêté en mai 2019, après plus de seize ans de cavale, sur le parking d’un hôpital de Haute-Savoie où il allait se faire soigner.
Instigateur de la stratégie d’attentats à la voiture piégée
Ce militant d’ETA, député régional d’Euskal Herritarrok, coalition nationaliste radicale, était passé dans la clandestinité après avoir été cité à comparaître en justice pour son rôle présumé dans un attentat contre une caserne de la garde civile à Saragosse, dans le nord-est de l’Espagne, qui avait fait onze morts, dont cinq enfants, en 1987. Selon l’Audience nationale, haut tribunal sis à Madrid, il était également recherché pour son implication présumée dans l’assassinat, en 1980, d’un cadre de Michelin en Espagne.
Josu Ternera est considéré comme l’instigateur de la stratégie d’attentats à la voiture piégée adoptée par ETA dans les années 1980. Selon les experts de la lutte antiterroriste, il avait aussi mis sur pied le commando « itinérant » d’ETA formé de militants français, qui a été le plus meurtrier de l’organisation. M. Ternera avait rejoint ETA vers la fin des années 1960, pendant la dictature de Francisco Franco, et s’était réfugié en France dans les années 1970. Chef d’ETA de la fin des années 1970 jusqu’à son arrestation en France en 1989 au moins, il avait fini par être écarté de l’état-major en 2006 par les plus radicaux de l’organisation.
Créée en 1959 sous la dictature espagnole de Franco, l’ETA est accusée d’avoir tué au moins 853 personnes durant quatre décennies de violences au nom de l’indépendance du Pays basque.